Séance publique du 4 octobre 2013
OBJET : Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes
Intervention de Raymonde Poncet - Conseillère départementale EELV.
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La parution du rapport de la Chambre régionale des comptes permet de revenir sur la communication sur le réaménagement de la dette structurée du 19 juillet 2013 qui n’a pas fait l’objet de débat et de relier ce rapport au projet de loi de finances 2014 qui traite des emprunts toxiques.
Le point commun de ces trois documents, c’est de ne pas traiter la responsabilité du système bancaire qui a promu des produits financiers spéculatifs auprès des collectivités territoriales souvent sans respecter leurs obligations d’informations, qui leur ont fait prendre des risques énormes qu’elles évaluent aujourd’hui en soultes de sorties, en se contentant de proposer aux collectivités, bien incapables de les payer immédiatement, de s’en acquitter selon divers mécanismes moins douloureux étalés sur de nombreuses années.
Comme nous l’avions dit, sous prétexte de fixer la dette, on fixe les profits financiers spéculatifs et le transfert de milliards d’euros au plan national des collectivités territoriales et établissements publics vers le marché financier.
Et les banques, ni responsables ni coupables, comptent bien ne pas participer à la prise en charge fut-elle partielle des surcoûts spéculatifs de leurs produits !
Ainsi, quand la chambre conclut que les réaménagements de l’été 2012 qui ont coûté plusieurs dizaines de millions au CGR sont globalement équilibrés, cela ne signifie aucunement que les deux parties ont vu le risque spéculatif réparti de façon équilibrée, cela signifie que le coût final du réaménagement payé par le CG selon différentes modalités n’est pas supérieur au coût de la soulte exigée par la banque pour revenir à un emprunt au taux fixe du cours du marché du jour de la renégociation.
Des dizaines de pages du rapport de la Chambre expertisent les réaménagements pour savoir si le CG n’a pas payé plus que la soulte de débouclement en rappelant qu’on sort toujours d’un emprunt structuré en versant une soulte à la banque à l’exception de la voie du contentieux juridique pouvant mener à l’annulation du contrat par exemple mais ce sera la seule allusion, une ligne en tout et pour tout sur 88 pages, histoire d’évoquer cette voie !
La voie du contentieux, celle que beaucoup aimerait ne pas évoquer, c’est la voie choisie par ceux qui contestent aux établissements bancaires cette ponction financière, de plusieurs centaines de millions pour ce qui concerne le Conseil Général et qui entendent réellement mener la bataille contre les contrats spéculatifs du lobby bancaire.
A l’exception de quelques remarques à peine évoquées, jamais développées, la chambre régionale est muette sur la dangerosité inhérente à ces produits structurés et c’est bien compréhensible puisque ses rapports intermédiaires n’ont pas alerté sur les risques ce qui ne l’empêche pas de pointer qu’alors même que certains éléments étaient enfin transmis au sein des rapports de gestion entre 2006 et 2009, ces données n’ont pas plus suscité de questions, de débat et de contrôle de l’assemblée délibérante.
Vous comprendrez qu’aujourd’hui, nous essayons d’être plus vigilants. Ainsi, la période sous revue s’arrêtant en 2012, je veux prolonger avec les réaménagements de 2013.
Dans la communication de juillet, les analyses du département concluent à l’équilibre financier pour les deux emprunts transformés, ce qui signifie, comme le dira certainement le prochain rapport de la chambre régionale, qu’ils sont globalement équilibrés et donc qu’ils ne coûteront à leur issue pas plus que le montant des deux soultes de sortie exigés, soit près de 61 millions.
61 millions de plus que le coût financier d’emprunts classiques qui ne font face à aucun actif, nous avons bien là l’illustration de la déconnection du marché financier d’avec le monde économique réel. Un péage de 61 millions pour qu’un encours de seulement 111 millions reviennent aux conditions du marché.
Quand la Chambre régionale estime que le département a les moyens de faire face aux charges financières induites par ces prêts structurés, y compris dans le cadre d’un scénario dégradé, en suggérant au département de le combler par une augmentation d’un point et demi de la fiscalité sur la taxe foncière sur les propriétés bâties, cela signifie un report sur les ménages.
Est-on bien d’accord dans notre assemblée pour que des augmentations d’impôts soient consacrées à payer aux banques le coût de la toxicité de leurs produits ?
A la place de deux soultes payés cash pour 61 millions, la renégociation a consisté à la décomposer en trois grandes composantes de 19 + 12 + 30 millions d’euros payées sur une durée en partie allongée de 9 ans, mais qui agrégées font toujours 61 millions, mais c’est dilué voire peu transparents, selon la Chambre quand la banque y inclus des emprunts nouveaux dont rien ne prouve la nécessité selon elle.
Le CG est cantonné à surveiller le marché pour saisir comme en 2013, le moment où le marché enregistre une baisse des soultes !
Rappelons comment nous allons payer cette ponction de 61 millions pour la seule année 2013 soit : 19 millions payés cash au 1er décembre, plus 12 millions d’indemnités non décaissées mais capitalisées par augmentation de l’endettement et enfin 30 millions, non visibles mais constituant pourtant la moitié du coût, provenant des «conditions financières des contrats de prêt de refinancement »
Donc, sans rien avoir obtenu de la banque, le Département a mis un terme aux actions contentieuses sur ces 2 emprunts alors que dans un premier temps vous aviez affirmé que vous n’en mainteniez pas moins les actions en justice sur ces deux emprunts et que les deux rachats n’étaient en rien conditionnés à la levée des actions en justice. Or, vous avez finalement levé les actions juridiques. Décidemment, la banque obtient tout et nous acceptons un marché de dupes !
J’en viens donc à l’article 60 du projet de loi de finances 2014 présenté cette semaine qui, en l’état, organise le même désarmement unilatéral des collectivités territoriales victimes des emprunts toxiques.
Pourquoi, à ce jour, un tel consensus ? La question de qui doit payer est-elle limitée au partage entre les collectivités territoriales ou l’Etat ?
Quant aux banques, elles ne seront sollicitées que pour moitié au fonds de 100 millions d’euros par an sur une durée de 15 ans, c’est-à-dire presque rien en regard des milliards estimés des coûts de leurs prêts toxiques ; on comprend qu’aucune protestation – sinon de posture – n’a été émise par les banques à ce projet de loi !
La protestation vient des collectivités qui se voient contraintes, si elles veulent solliciter l’aide du Fonds, de conclure une négociation globale – ce qui oblige à négocier tous les emprunts en même temps et non emprunt par emprunt selon les parités monétaires et les conditions du marché – et de renoncer à tous les contentieux sans autre condition.
Le Président de l’Association des Acteurs Publics contre les Emprunts toxiques a raison de dire que la loi ignore « complétement la responsabilité des banques dans ce dossier, au détriment de collectivités locales » et les placent dans une position de faiblesse dans les négociations.
Et d’ajouter que si « La création de ce fonds est une bonne chose (...) les modalités de gestion de ce fonds ne sont pas acceptables ». Sans amendements dans un sens plus favorable aux collectivités, le Président affirme que les collectivités « iront au bout de tous les contentieux engagés contre les banques.
Nous approuvons cette détermination et espérons, Madame la Ministre, que le gouvernement l’entendra.
D’autant que le projet de loi prévoit la validation des contrats de prêt conclus avant la loi entre une personne morale et un établissement de crédit, y compris lorsque ces prêts sont contestés pour défaut de mention du Taux d’intérêt Effectif Global (TEG) alors que, depuis le jugement de Nanterre, là résidait le point fort du rapport de force des collectivités face aux banques. Ainsi, beaucoup d’élus qualifient cette Loi de « Loi d’amnistie » pour les banques.
De fait, les banques rassurées par le projet de Loi « négocient en position de force les soultes de sorties ». Cela n’est pas acceptable !
Ces trois documents limite l’action politique à la seule gestion des coûts spéculatifs finalement payés par les collectivités. D’où, nonobstant quelques remarques critiques, un relatif satisfecit donné par la Chambre régionale à la gestion des emprunts toxiques par le département.
Evacuées, l’action judiciaire et l’action collective avec les autres acteurs publics, l’exercice se veut gestionnaire, technique et limité !
Avec un projet de Loi amendé pour ne pas désarmer les seules collectivités et un maintien de nos actions en justice, nous devons peser pour que les 3 derniers emprunts – le noyau le plus dur, les emprunts très dangereux- ne coûtent pas de nouveau des centaines de millions à la collectivité territoriale et qu’importe que cela soit à la métropole ou au nouveau Rhône, c’est in fine toujours sur les populations.
Pour cela, il faudra la mobilisation de l’association des acteurs publics et la mobilisation citoyenne. C’est pourquoi nous souhaitons que le Département adhère et soutienne l’action de l’association des Acteurs Publics contre les Emprunts toxiques.
Je vous remercie.
Collectif des Monts du Lyonnais pour un Audit Citoyen de la Dette Publique
Je vous remercie beaucoup pour cette incroyable source d information.
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31/01/2014 07:06
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